mercredi 21 octobre 2009

Une belle journée

Lundi matin, Chantal avait rendez-vous à 07h00 pour une chirurgie d’un jour. Une belle aventure s’annonçait donc pour ce début de semaine familial.

Vers 06h00, on roulait vers le sud de l’Ile et un des pavillons de son hôpital universitaire francophone. Assez tranquille sur la route mais pas tellement dans le véhicule moteur puisque notre Marilou nous entretient aisément d’à peu près tout ce qui lui passe par la tête et Dieu sait qu’il y en a des choses qui se promènent dans ce petit coco. Je me demande bien où elle va chercher tout cela. Surtout à 06h00! J’ai donc laissé Chantal là-bas assez tôt parce que je devais remonter vers le nord puisque la jeune doit quand même continuer l’école. C’est jeune un peu pour le décrochage. Surtout qu’elle aime encore cela. Un bon petit déj en passant par la maison et le dompage numéro deux s’effectue dans l’ordre. Marilou est un peu inquiète pour sa mère qu’elle me glisse à l’oreille. Six ans et déjà maternelle dans l’attitude. Une vraie fille, quoi!

Je redescends donc en me demandant si ma blonde est déjà en salle d’opération. Je rêve un peu, c’est permis. Je laisse mon chariot dans un enclos où ils doivent faire des affaires d’or puisque les véhicules y sont cordés assez serrés et que les tarifs quoiqu’exhorbitants soient des plus légaux. Les préposés n’ont pas de cravates mais ça ne m’empêche pas pour autant de me demander si mon char est en sécurité dans cet espace ou si nous ne nous retrouverons pas en plein scandale financier. On n’est jamais trop prudent que je me dis. Quand je passerai à LCN pour en parler plus tard lorsque le scandale sera dévoilé, je ne voudrais surtout pas que les auditeurs puissent se dire avec un sourire en coin : « Tu parles d’un épais, comment n’a-t-il pas pu réaliser ce qui se passait? » Je dois avoir un faible pour la célébrité et ça doit être la raison pour laquelle j’essaie de toujours être prêt. Je laisse donc finalement mon véhicule sans surveillance dans ce stationnement.

En arrivant à l’étage prévu, je m’informe de la situation. Chantal est dans une chambre de chirurgie d’un jour. Une grande chambre quand même! Il faut quand même admettre que ça prend un peu d’espace pour corder 20 lits. L’image qui me vient en tête en pénétrant dans ce local est l’étable où étaient alignés les animaux chez mes amis fils de cultivateurs quand je demeurais à Louiseville. Chacun des lits ou plutôt civières est bien rangé dans une zone d’environ 6 pieds – la longueur de la civière – par pas plus de 4 je pense. Toutes ces stalles sont bien séparées par des rideaux blancs sales dans un style très hôpital. Quand on parle de promiscuité, je considère que c’est un très bel exemple. Je trouve Chantal dans la sienne, sourire aux lèvres, comme d’habitude. C’est la cacophonie là-dedans. Tout le monde s’exprime sur son état ainsi que sur celui de ses voisins immédiats. De vrais beaux gérants d’estrades dont certains intervenants du secteur de la santé doivent s’inspirer dans leurs réponses à leurs patients. Nos voisins immédiats maintenant. À la droite de Chantal se trouve septuagénère peut-être même octogénaire – en tout cas avec beaucoup d’ancienneté – qui râle déjà en dormant et il n’est même pas passé par le bistouri. À gauche c’est un peu plus drôle. Roland est là pour une pierre au rein. Je l’ai bien écrit au singulier parce qu’il n’en a qu’un. La vessie est aussi absente parce qu’il est abondamment question de son ptit sac qui l’accompagne partout. Le gars semble maganné, je dirais. Il est aussi un peu sourd et le fait savoir à la planète entière en parlant très fort avec sa conjointe Fernande. Avec son ami Parkinson, sa demi-surdité ainsi que probablement d’autres petits bobos dont nous n’avons pas eu l’opportunité d’entendre ou de voir les détails, Fernande ne donne d’ailleurs pas sa place. Toujours est-il que leur conversation a à peu près l’air de cela.
- C’est ben long!
- Je te l’avais dit de rester à maison…
- Comment ça c’est long de même? Il pourrait nous dire ce qui se passe!
- Fernande, arrêtes, tu me fatigues!
- Écoute Roland, moi j’ai faim!
- Toi, tu peux manger, pas moi et depuis hier à part de cela.
- …
- Je suis le septième sur la liste
- Il y en a combien de passé tu penses?
- Je l’sais-tu moé. Je vois rien couché icitte. Pis j’ai de la misère avec mon sac à part de cela.
- Ouin
- J’espère qu’on va avoir le temps d’aller manger à la cafétéria.
- Fernande, tu m’énarves…
La mignonne conversation s’est ensuite poursuivie entre les deux belligérants jusqu’à ce qu’ils viennent ramasser Roland pour son enlèvement de sa ou de ses pierres sur le rein qui lui reste encore. La vie n’est parfois pas facile… à vivre. Je le sais maintenant parce que c’est Fernande et Roland qui me l’ont si savamment appris.

Le courrier est venu ramasser Chantal vers midi. Je me suis donc dirigé d’un pas assuré vers le casse-croûte pour la casser. J’avais faim comme le mentionnait si justement Fernande mais je m’étais abstenu pour ma part de le mentionner à ma blonde qui souffrait probablement plus que moi de ce fait pour n’avoir ni consommé de café ni de déjeuner comme mes toasts au beurre de pinotte que j’avais ingurgité un peu plus tôt malgré mon allergie aux dites arachides selon un allergologue reconnu à travers sa confrérie. De toute façon, la médecine étant ce qu’elle est, il ne faut surtout pas trop s’en faire avec toutes ces pécadilles. J’en avais d’ailleurs déjà traité dans un article parue dans « Enfants Québec » en 2003, je pense. Peut-être en 2004 aussi, je ne me souviens plus très bien, il faudrait bien que j’en parle à ma Quiche.

En lisant le dernier Anne Robillard, j’étais plongé en plein 13e siècle sur le bord de la Méditerranée, lorsque j’entendis dans mon oreille un léger bourdonnement. C’était Fernande qui était stationné derrière moi dans la salle d’attente et qui attendait son Roland en se disant qu’elle avait probablement faim. Ce n’était qu’un chuchotement mais il m’a quand même sorti de ma rêverie passagère. J’ai réalisé que j’étais assis dans la salle d’attente depuis une couple d’heures et heureusement l’ascenseur s’est écrié tout à coup : « 8e étage, on monte! ». Ma blonde est alors sortie, pseudo-victorieuse, de l’ascenseur.

L’opération n’a pas été réussi qu’ils ont dit. Je n’ai pas vraiment été surpris. Chantal non plus. Pour ce qui est de renverser des probabilités basses, on est fort chez nous. On est aussi un peu déçus de la tournure de la situation mais comme on dit : « Dans la vie comme au hockey, un peu de Quick et l’affaire est ketchup! »

Je me suis donc éclipsé après m’être assuré que tout était sous contrôle en ce qui a trait à Chantal puisque je devais aussi aller récupérer notre charmante 6 ans à l’école du quartier. Marilou et moi avons donc effectué la routine du « War zone » ensemble sans trop se chicaner pour une fois, en attendant que l’hôpital nous appelle pour récupérer Chantal qui aurait ainsi son congé. Vers 18h15, Chantal m’a appelé en me disant qu’elle était un peu tannée et que, de toute façon, le département fermait à 19h00. J’espère qu’elle aura son congé que je me suis dit mentalement parce que ça ne doit pas être drôle d’être SDF dans un hôpital. Marilou, son pyjama et moi nous sommes donc pointés là-bas vers 19h00. Elle n’avait pas eu son congé encore mais on ne l’avait pas mis dehors. Armée de son poteau roulant, elle s’est donc mise à arpenter les lieux en compagnie de Marilou qui était toute fière de pousser sur ledit poteau. On attendait les résultats de tests sanguins avant qu’ils puissent la libérer.

On est revenus à la maison vers 20h. Claqués. Toujours aussi convaincus de l’efficacité du système.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

à lire ça, on se dit que juste à penser à être malade et on le devient.. .par anticipation de ce qu'on risque de vivre! - soupir -

moi

Louchia a dit...

Tout va ok pour la belle Chantal?? C'est pas rassurant de lire tout ça :(